Newsletter sociale – mars 2025

Actualités | 12 mars 2025

Le budget de la Sécurité sociale pour 2025 a été adopté dans un contexte de déficit croissant et d’instabilité politique. Avec un déficit estimé à 22,1 milliards d’euros en 2025, la nouvelle Loi de Financement de la Sécurité sociale (LFSS) introduit des ajustements majeurs en matière de cotisations, d’exonérations et de lutte contre la fraude. Cet article décrypte les principales mesures applicables dès le 1er mars 2025 et leurs impacts pour les entreprises et les salariés.

Contexte

Dans le cadre de l’effort de redressement visant à rétablir une situation financière plus stable en France, le budget de la Sécurité sociale pour 2025 a enfin été voté et adopté. Cette adoption intervient dans un contexte de déficit budgétaire et d’instabilité parlementaire sans précédents. En effet, le déficit de la Sécurité sociale atteindrait 22,1 milliards d’euros en 2025, un niveau inédit hors période de crise, alors qu’il était estimé à 16 milliards d’euros dans le projet de loi initialement présenté à l’automne 2024 par le gouvernement de Michel Barnier. À l’horizon 2028, ce déficit devrait encore s’aggraver pour atteindre 24,1 milliards d’euros.

Malgré ces perspectives financières, le cadre législatif a été partiellement validé par le Conseil constitutionnel. Par décision constitutionnelle en date du 28 février 2025, le Conseil a confirmé la conformité de la grande majorité des mesures de la loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS). Sur les 102 articles adoptés, seuls 14 ont été censurés, principalement en raison de leur absence d’incidence financière directe, les excluant ainsi du champ d’une loi de financement. La LFSS 2025 a ainsi été promulguée le 28 février 2025. Les principales mesures évoquées ci-après prévoient une entrée en vigueur dès le 1er mars 2025.

Réforme des allègements généraux de cotisations patronales

La LFSS 2025 prévoit la réorganisation des allègements généraux de cotisations patronales en deux phases :

En 2025 : les deux plafonds d’éligibilité aux réductions de taux sur les cotisations patronales d’assurance maladie et d’allocation familiales sont revus :

  1. Abaissement à 2,25 SMIC* (au lieu de 2.5 actuellement) du salaire plafond ouvrant droit au mécanisme de réduction de taux de la cotisation patronale d’assurance maladie (soit 3 932,28€ au lieu de 4 368.00€)
  2. Abaissement à 3,3 SMIC* (au lieu de 3.5 actuellement) du salaire plafond ouvrant droit à la réduction de taux sur la cotisation patronale d’allocations familiales (soit 5 765,89€ au lieu de 6 115.20€).

*Les décrets d’application devraient indiquer quelle valeur du SMIC sera retenue par calculer ces nouveaux plafonds (soit celui en vigueur en décembre 2023, soit celui en vigueur en janvier 2025).

Outre ces abaissements de plafonds, les primes de partage de la valeur (PPV) sont intégrées dans l’assiette de calcul de la réduction générale des cotisations patronales (RGCP), tant au niveau de la formule de calcul du coefficient que de l’assiette de la réduction.

En 2026 : ces deux taux de cotisation patronale « maladie » et « famille » seront supprimés pour les périodes d’emploi courant à partir du 1er janvier 2026. Les modalités de calcul du coefficient de la RGCP seront modifiées dans un décret à venir et cette réduction serait neutralisée pour les rémunérations supérieures à 3 SMIC.

Apprentissage : abaissement du seuil d’exonération de cotisations salariales & CSG/CRDS

La LFSS prévoit également une baisse du niveau des allégements de cotisations et de contributions salariales dont bénéficient les apprentis sur leur rémunération.

Pour les contrats d’apprentissage conclus à partir du 1er mars 2025 :

  • La limite d’exonération des cotisations salariales est abaissée de 79 % à 50 % du SMIC ;
  • La fraction du salaire des apprentis excédant 50 % du SMIC est assujettie à CSG/CRDS (alors que l’exonération était totale jusqu’à présent).

Concrètement, à rémunération identique, les apprentis payés plus de 50 % du SMIC brut auront un salaire net inférieur par rapport à la situation antérieure. Il n’y a aucune obligation légale pour l’employeur de compenser cette baisse.

Pour les contrats d’apprentissage conclus avant le mois de mars 2025, les exonérations salariales continuent de s’appliquer dans les conditions antérieures.

Maintien du dispositif d’exonération de cotisations patronales TO-DE

Afin de faciliter l’embauche de main d’œuvre dans le secteur agricole compte tenu des derniers mouvements sociaux du secteur, la LFSS a pérennisé le dispositif d’aide à l’embauche de travailleurs saisonniers agricoles, aussi nommé dispositif TO-DE (travailleurs occasionnels – demandeurs d’emploi). Ce dispositif, qui devait initialement prendre fin au 31 décembre 2025, permet à l’employeur d’être exonéré de cotisations patronales sur ces embauches.

Cette exonération porte sur le même périmètre de cotisations que la réduction générale de cotisations patronales (RGCP). La loi prévoit que le niveau de rémunération ouvrant droit à l’exonération maximale est de 1.25 SMIC rétroactivement à compter du 1er mai 2024 (contre 1.20 SMIC en 2024).

La LFSS prévoit également d’élargir le bénéfice de ce dispositif aux coopératives :

  • D’utilisation du matériel agricole ;
  • De conditionnement des fruits et légumes.

Réduction du dispositif d’exonération de cotisations patronales pour les Jeunes Entreprises Innovantes (JEI), de Croissance (JEC), Universitaires (JEU)

Les entreprises ayant le statut de JEI/JEC ou encore JEU, sous réserve de respecter des conditions de validité, peuvent bénéficier d’exonération de cotisations patronales. Ces exonérations de cotisation sont appliquées uniquement sur l’effectif concerné par les activités de recherche et de développement pendant 7 ans à compter de la création de l’entreprise.

La LFSS prévoit, qu’à compter du 1er mars 2025, que le niveau de dépenses de recherche doit désormais représenter au moins 20% des charges (contre 15% avant la loi) pour les JEI. à l’exception des pertes de change et des charges nettes sur cessions de valeurs mobilières de placement, fiscalement déductibles au titre de cet exercice.

Le niveau de dépenses en recherche est également rehaussé pour les entreprises ayant le statut de JEC : entre 5 et 20% au lieu de 5 et 15%).

Attribution gratuite d’actions (AGA) : augmentation du taux de la contribution patronale au 1er mars 2025

Les AGA permettent aux sociétés par actions d’octroyer gratuitement des actions à leurs salariés et dirigeants dans des conditions prévues par la loi.

En principe, une assemblée générale autorise l’opération d’attribution et détermine les conditions pour en bénéficier (nombre d’actions, durée de conservation etc.). Le conseil d’administration ou le directoire détermine l’identité des bénéficiaires des attributions et, s’il y a lieu, les conditions et critères d’attribution.

Le bénéficiaire de l’attribution ne devient propriétaire des actions qu’au terme d’une « période d’acquisition » qui ne peut être inférieure à 1 an. Le bénéficiaire doit ensuite les conserver pendant une certaine durée (« période de conservation »). Au cumul, les deux périodes doivent au moins durer 2 ans. A la fin de cette première période « d’acquisition », existe une obligation de déclaration d’acquisition de ces actions qui emporte paiement d’une contribution patronale.

L’éventuel gain résultant de ces AGA est exclu de l’assiette des cotisations sociales. L’employeur est uniquement redevable de la contribution patronale spécifique, exigible le mois suivant la date d’acquisition des actions par le bénéficiaire. La LFSS a relevé le taux de cette contribution de 20 à 30% à compter du 1er mars 2025.

Extension du champ d’opposabilité BOSS et des circulaires auprès des organismes de l’Etat

Outre l’extension du champ d’opposabilité des circulaires administratives issues d’organismes, la LFSS 2025 inscrit officiellement le Bulletin officiel de la sécurité sociale (BOSS) dans le code de la sécurité sociale, en précisant qu’il est opposable à tous les organismes de recouvrement, y compris la MSA. Toutes les instructions et circulaires sur les cotisations et contributions devront y être publiées.

Les mesures visant à lutter contre la fraude

La LFSS a prévu tout un arsenal de mesures ayant pour objectif de lutter contre la fraude dans de nombreux domaines (contrôle des inscriptions des entreprises étrangères sans établissement en France, extension du droit de communication des URSSAF ; contrôles mutualisés des organismes sociaux ; communication entre organismes dans l’UE etc.).

Parmi les plus notables pour les entreprises, la LFSS a prévu les mesures suivantes :

  1. Transmission d’informations aux employeurs sur la fraude aux indemnités journalières : en cas de fraude avérée, les directeurs des organismes sociaux (CPAM) pourront transmettre aux employeurs les informations nécessaires pour caractériser l’infraction, par tous moyens.
  2. Plateformes de télémédecine délivrant principalement des arrêts de travail : la LFSS prévoit l’interdiction des plateformes visant à fournir à titre principal, explicitement ou implicitement, des actes de télémédecine prescrivant ou renouvelant un arrêt de travail. La loi prévoit également qu’un acte de télémédecine effectué par un professionnel de santé exerçant son activité à titre principal à l’étranger ne peut donner lieu à la prescription ou au renouvellement d’un arrêt de travail, quelle qu’en soit la durée.

Assurance Maladie – Baisse de l’indemnisation des arrêts maladie dès le 1er avril

Par décret en date du 20 février 2025 (Décret 2025-160), le salaire plafond pris en compte pour le calcul des indemnités journalières de sécurité sociale (IJSS) est passé de 1.8 à 1.4 SMIC calculé sur la base de la durée légale du travail.

En conséquence, l’indemnité journalière maximale passera de 53.31€ à 41.47€ (base SMIC horaire de 11.88€). Si l’on compare avec la limite précédente sur la base du SMIC à 11,88 €, cette limite passe à 1,4 × 11,88 € × 35 h × 52/12 = 2 522,52 € (au lieu de 3 243,24 €).

L’article 2 du décret prévoit que cet abaissement du salaire plafond est applicable aux IJSS versées au titre des arrêts de travail débutant à compter du 1er avril 2025. Cette mesure ne sera donc pas applicable aux arrêts de travail en cours avant cette date.

Cette baisse du plafond des IJSS ne représente pas une mesure sans conséquence pour les employeurs. :

  • Si les employeurs appliquent le maintien de salaire, par exemple les entreprises soumises aux dispositions de la convention collective SYNTEC pour les salariés ayant au moins 1 an d’ancienneté, ce maintien se traduira logiquement par une compensation de la différence entre 1.8 et 1.4 SMIC étant donné que le niveau du maintien de salaire reste exprimé en pourcentage du salaire du salarié, déduction faite des IJSS. En conséquence, le complément employeur augmente de fait.
  • Dans les contrats de prévoyance où existe une garantie incapacité de travail qui assure un certain pourcentage de salaire à l’assuré, la compensation de salaire par la prévoyance en complément des IJSS risque d’augmenter nécessairement si le plafond de ces dernières est abaissé. Cette nouvelle mesure serait susceptible, à terme, d’avoir une incidence sur les couvertures d’assurance actuelle et également sur le niveau des cotisations (salariales et/ou patronales) versées pour financer l’augmentation de cette prise en charge.

Avantages en nature véhicule – un nouvel arrêté change les taux et les règles de calcul au 1er février 2025

Pour inciter au verdissement du parc automobile des entreprises, le gouvernement diminue la taxation de l’avantage en nature que constitue le véhicule de fonction électrique, et augmente celle du thermique.

L’arrêté du 25 février 2025 publié le 27 février au Journal officiel (NOR : TSSS2505703A) relève de façon significative les pourcentages applicables pour les nouveaux véhicules thermiques mis à disposition à compter du 1er février 2025.

Les règles d’évaluation forfaitaire varient désormais selon que le véhicule a été mis à disposition du salarié jusqu’au 31 janvier 2025 ou à compter du 1er février 2025. C’est bien la date de mise à disposition du véhicule qui est déterminante ici et non la date d’acquisition ou de location du véhicule par l’entreprise.

Cas particulier des véhicules électriques : les règles dérogatoires favorables prévues pour les véhicules fonctionnant exclusivement à l’énergie électrique sont prolongés jusqu’au 31/12/27 mais toujours avec des modalités différentes selon la date de mise à disposition du véhicule. De plus, pour bénéficier de l’abattement, une condition supplémentaire est désormais exigée : le véhicule doit obtenir un score environnemental supérieur à 60 points (calculé en tenant compte de l’impact environnemental de toutes les étapes du cycle de vie du véhicule préalables à sa mise en vente).

En synthèse, deux modalités de calcul coexistent désormais en fonction de la date de mise à disposition au salarié du véhicule.

Véhicule thermique mis à disposition jusqu’au 31/01/2025 Nouveau véhicule thermique mis à disposition à compter du 01/02/2025 Véhicule électrique mis à disposition jusqu’au 31/01/2025 Nouveau véhicule électrique ayant un score environnemental > 60 pts, mis à disposition à compter du 01/02/2025 et jusqu’au 31/12/27
Valorisation forfaitaire (sur la valeur d’achat)
Sans prise en charge du carburant privé
9% du coût d’achat (6% si > 5 ans) 15% du coût d’achat (10% si > 5 ans Abattement de 50% dans la limite de 2000,30 €/an Abattement de 70% dans la limite de 4582 €/an
Valorisation forfaitaire (sur la valeur d’achat)
Avec prise en charge du carburant privé
12% du coût d’achat (9% si > 5 ans 20% du coût d’achat (15% si > 5 ans Exclusion des frais d’électricité engagés par l’employeur Exclusion des frais d’électricité engagés par l’employeur
Valorisation forfaitaire (véhicule loué)*
Sans prise en charge du carburant privé
30% du coût global annuel incluant location, entretien, et assurance 50% du coût global annuel incluant location, entretien, et assurance Abattement de 50% dans la limite de 2000,30 €/an Abattement de 70% dans la limite de 4582 €/an
Valorisation forfaitaire (véhicule loué)*
Avec prise en charge du carburant privé
40% du coût global annuel incluant location, entretien, assurance et carburant privé 67% du coût global annuel incluant location, entretien, assurance et carburant privé Exclusion des frais d’électricité engagés par l’employeur Exclusion des frais d’électricité engagés par l’employeur

* Le montant forfaitaire obtenu est plafonné. Pour rappel, il ne peut excéder celui prévu pour l’avantage en nature lorsque le véhicule a été acheté par l’entreprise.

Cette augmentation substantielle aura des répercussions directes importantes sur les cotisations sociales dues par l’employeur et le salarié, ainsi que sur l’impôt sur le revenu de ce dernier. Des clarifications du Bulletin Officiel de la Sécurité Sociale sont à attendre.

Assurance Chômage – Les contributions à l’assurance chômage en 2025

La convention d’assurance chômage du 15 novembre 2024 et ses textes associés sont agréés par un arrêté du 19 décembre 2024 (NOR : PRMX2433664A). Les textes prévoient une baisse de la contribution patronale et une réforme du dispositif de bonus-malus.

  1. Baisse de la cotisation patronale au 1er mai 2025 : la cotisation patronale chômage baissera de 0,05 point le 1er mai 2025, passant de 4,05 % à 4,00 % (convention art. 4 § 1er).
  2. Réforme du « bonus-malus » au 1er septembre 2025 : s’agissant du dispositif de bonus-malus (dispositif conduisant à moduler le taux de la contribution des entreprises d’au moins 11 salariés dans les secteurs d’activité où le recours aux contrats précaires est fort) :
    • Le taux modulé notifié en septembre 2024 continuera d’être applicable jusqu’au 31 août 2025 mais, à partir du 1er mai 2025, il sera réduit de 0,05 point ;
    • La quatrième période de modulation débutera le 1er septembre 2025 et se terminera le 28 février 2026 (Règlement art. 51). Pour cette quatrième période de modulation le dispositif de bonus-malus sera également adapté.
    • À partir du 1er mars 2027, le dispositif entrera (enfin) dans son régime de droit commun : le taux modulé sera notifié chaque année au plus tard le 15 mars et sera applicable du 1er mars d’une année au 28 ou 29 février de l’année suivante (Règlement art. 51).

Pour plus d’information, nous vous invitons à consulter l’article concernant les nouvelles règles d’indemnisation de l’assurance chômage.

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